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La Tunisie épinglée par les experts des Nations Unies sur la question amazighe...

Le CERD rend public ses recommandations pour la Tunisie suite à l’examen de son rapport

vendredi 13 mars 2009, par Tilelli



Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale des Nations Unies, CERD, vient de rendre public ses conclusions finales et recommandations suite à l’examen du rapport de l’Etat tunisien soumis à la 74eme session du Comité qui s’est tenue du 16 février au 6 mars 2009 à Genève.

La question amazighe est la préoccupation la plus importante que le CERD a eu à exprimer dans ses conclusionset recommandations qui reflètent, bien entendu, les débats des séances de l’examen du rapport de la Tunisie les 16 et 17 février dernier, débats au cours desquels la question amazighe est souvent revenue.

Les experts du Comité onusien ont posé des questions précises aux représentants du gouvernement tunisien venus défendre leur rapport et qui n’ont pas su apporter les réponses nécessaires. L’Etat s’est borné à maintenir ses allégations selon lesquelles la question berbère n’existe pas en Tunisie et que les Berbères ne sont qu’une infime minorité parfaitement intégrée dans la société tunisienne considérée comme de langue et culture arabes et de religion musulmane. Et de rajouter que ces Berbères n’ont pas de revendications.

L’Etat tunisien, dans son rapport, a eu même le culot de citer le passé libyco-berbère comme un apport à l’identité arabo-islamique alors que l’élément libyco-berbère est l’élément autochtone en Afrique du Nord et l’élément arabo-musulman est un élément conquérant arrivée tout récemment dans ce pays.


Cette 74eme session du CERD était une occasion pour l’association Tamazgha de présenter un rapport alternatif à propos de l’Etat tunisien et la question berbère. Tamazgha a relevé l’essentiel des discriminations dont sont victimes les Berbères et a mis le doigt sur les contradictions de l’Etat tunisien quant à ses réponses aux questions des experts à propos de la question amazighe. Tamazgha s’est employée à montrer comment l’Etat tunisien conduit une politique visant à assimiler les populations berbérophones au reste de leurs concitoyens afin qu’ils s’arabisent pour qu’à terme la langue berbère devienne une langue morte. Elle accuse les autorités tunisiennes de mettre en place en place une politique dont l’objet est la disparition pure et simple du fait berbère. Bien entendu, Tamazgha a avancé suffisamment d’éléments qui montrent que l’Etat tunisien est en violation de toutes les conventions internationales qui recommandent la protection des minorités et de leurs intérêts.

Dans son rapport, Tamazgha formule des propositions pour que cesse les discriminations officielles dont sont victimes les Berbères qui subissent l’Etat tunisien. L’essentiel de ces propositions, comme le montrent les extraits ci-dessous, ont été retenues par les experts du CERD et ont été reprises dans leurs recommandations à l’Etat.


Ainsi, les membres du Comité, dans leurs recommandations, notent l’absence de toute information concernant les Berbères dans le rapport de la Tunisie et invite l’Etat partie à attacher une attention particulière à "la situation des Berbères en tant que composante spécifique de la population tunisienne".

La Rédaction de Tamazgha.fr.




EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

2Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale2

TUNISIE

3C. Sujets de préoccupation et recommandations3

10. Le Comité prend note de nouveau de l’écart existant entre l’appréciation de l’État partie selon laquelle la société tunisienne serait homogène et des informations fournies par l’Etat partie lui-même au sujet de l’existence de populations différentes, telles que les populations berbérophones et d’Afrique subsaharienne vivant dans le pays.

Eu égard à l’absence de données statistiques précises sur la composition ethnique de la société tunisienne, le Comité recommande à l’État partie de fournir dans ses rapports ultérieurs des estimations concernant la composition ethnique de sa population comme il est recommandé aux paragraphes 10 et 12 des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention (CERD/C/2007/1), et il appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale 8 (1990) concernant l’auto identification des membres des groupes raciaux et ethniques.

11. Le Comité prend note des informations fournies par l’Etat partie selon lesquelles la population amazigh de Tunisie, qui ne constituerait pas plus de 1% de la population totale, serait parfaitement intégrée dans l’unité plurielle tunisienne et ne souffrirait d’aucune forme de discrimination.

Le Comité appelle l’Etat partie à prendre en considération la façon dont les Amazighs eux-mêmes se perçoivent et se définissent. Le Comité invite instamment l’Etat partie à reconsidérer la situation des Amazighs à la lumière des accords internationaux relatifs aux droits de l’homme, en vue de garantir aux membres de cette communauté l’exercice des droits qu’ils revendiquent, notamment le droit à leur propre culture et à l’usage de leur langue maternelle, à la préservation et au développement de leur identité.

12. Le Comité note qu’en dépit des recommandations faites en 2003, l’Etat partie a réaffirmé dans son rapport périodique que la discrimination raciale n’existe pas en Tunisie. Il croit comprendre que l’État partie entend par là que, même si des incidents de discrimination raciale peuvent se produire, il ne commet lui-même aucune discrimination raciale systématique.

Etant donné que les actes de discrimination raciale souvent échappent à la politique officielle des gouvernements, le Comité recommande à l’État partie d’entreprendre des études en vue d’apprécier et d’évaluer concrètement l’existence de discrimination raciale exercée de facto par des personnes, des groupes ou des organisations.

13. Le Comité note que la loi n° 2003-75 de l’Etat partie ne répond pas entièrement aux exigences de spécificité de l’article 4 de la Convention.

Rappelant ses recommandations générales 7 (1985) and 15 (1993), le Comité recommande à l’État partie d’adopter une législation spécifique sur le délit de discrimination raciale et la propagation de la haine raciale satisfaisant à toutes les exigences de l’article 4 de la Convention et prévoyant des sanctions proportionnelles à la gravité des infractions.

14. Le Comité regrette que les informations fournies sur la mise en œuvre de l’article 5 de la Convention relatif à l’obligation des Etats parties de garantir la jouissance des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels et des libertés fondamentales sans discrimination raciale soient incomplètes.

Le Comité recommande à l’État partie de traiter de façon plus précise la question de la non discrimination dans les informations concernant la jouissance des droits énoncés à l’article 5 de la Convention et de fournir des informations concrètes sur l’exercice de ces droits par les migrants d’Afrique subsaharienne et les Amazighs relevant de sa juridiction.

16. Tout en prenant acte des informations fournies par l’Etat partie, le Comité reste préoccupé par certaines informations faisant état de pratiques administratives interdisant l’inscription au registre de l’état civil des prénoms amazighs.

Le Comité recommande à l’Etat partie de prendre toutes les mesures appropriées pour assurer l’abandon effectif de cette pratique sur l’ensemble de son territoire.

17. Le Comité prend note de la position de l’Etat partie mais se dit préoccupé par des informations selon lesquelles les Amazighs n’ont pas le droit de créer des associations à caractère social ou culturel.

Le Comité engage l’Etat partie à prendre en considération les recommandations formulées par le Comité des droits de l’homme dans ses observations finales concernant la Tunisie (2008) visant à ce qu’elle veille à l’enregistrement des associations et à ce qu’un recours efficace et dans les plus brefs délais contre tout refus d’enregistrement soit garanti à toutes les associations concernées.

18. Le Comité note que, d’après certaines informations, les Amazighs sont empêchés de préserver et d’exprimer leur identité culturelle et linguistique en Tunisie.

Le Comité souligne que l’État partie est tenu, aux termes de l’article 5 de la Convention, de respecter les droits des Amazighs de jouir de leur propre culture et de parler leur propre langue en privé et en public, librement et sans discrimination. Le Comité recommande à la Tunisie de considérer la possibilité d’autoriser l’usage du tamazight (langue amazigh) dans les démarches des berbérophones au sein des différentes administrations et juridictions. Il invite l’État partie à favoriser la protection et la promotion de la culture amazigh en tant que culture vivante et à prendre des mesures, en particulier dans le domaine de l’éducation, afin d’encourager la connaissance de l’histoire, de la langue et de la culture des Amazighs. Il recommande à la Tunisie d’envisager la possibilité de diffuser des émissions en tamazight dans les programmes des médias publics.


Lire le rapport de Tamazgha

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