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Intervention de M. Alain Juppé, ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères et européennes au Nations Unies

le 17 mars 2011, lors du vote sur le projet de résolution concernant la Libye

samedi 19 mars 2011, par Tilelli

Monsieur le Président,

Je souhaite vous remercier pour vos chaleureuses paroles de bienvenue auxquelles j’ai été très sensible.

Madame la vice-secrétaire général,

Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs,

Mesdames, Messieurs,

Le monde est en train de vivre l’une de ces grandes révolutions qui changent le cours de l’Histoire : de l’Afrique du Nord au Golfe Persique, les peuples arabes clament leur aspiration à la liberté et à la démocratie !

En Tunisie, avec la « Révolution du Jasmin », en Egypte avec la Journée du 25 janvier, un grand espoir s’est levé : la transition démocratique est engagée dans un esprit de maturité et de responsabilité.

Au Maroc, dans un discours courageux et visionnaire, le roi Mohamed VI a annoncé la mise en place d’une monarchie constitutionnelle.

Ce « nouveau printemps arabe » est pour nous tous, j’en suis sûr, une bonne nouvelle. Notre devoir et notre intérêt nous commandent de l’accompagner avec confiance et disponibilité, non point pour donner à quiconque des leçons ou des modèles mais pour aider chaque peuple à construire lui-même son avenir.

En Libye, hélas ! depuis plusieurs semaines, la volonté populaire est foulée au pied par le régime du colonel Kadhafi, qui mène une répression meurtrière contre ses propres citoyens.

C’est la raison pour laquelle, l’Assemblée générale des Nations unies, sur recommandation du Conseil des droits de l’Homme le 25 février dernier, a suspendu la Libye de ce Conseil.

C’est pourquoi le 26 février, le Conseil de sécurité a estimé, je le cite, que « les attaques systématiques et généralisées (...) commises contre la population civile pourraient constituer des crimes contre l’humanité ». Par sa résolution 1970 adoptée à l’unanimité, il a rappelé que les autorités libyennes ont la responsabilité de protéger le peuple libyen.

Il a également exigé « qu’il soit immédiatement mis fin à la violence ». Il a souhaité que les responsables de ces crimes soient renvoyés devant la Cour pénale internationale dont il a saisi le Procureur, il a sanctionné le colonel Kadhafi, ses proches et ses affidés. Il a enfin décidé un embargo sur les armes à destination de la Libye.

Ces mesures n’ont pas été suffisantes. Dans tout le pays, les violences perpétrées contre les populations civiles n’ont fait que redoubler.

Face à ces provocations intolérables, la communauté internationale a réagi dans une quasi-unanimité :

- l’Union européenne l’a fait lors du Conseil européen exceptionnel du 11 mars dernier

- les pays du G8 l’ont fait mardi dernier à Paris

- les organisations régionales se sont également exprimées avec force. Je pense d’abord à la Ligue arabe qui, dans sa résolution du 12 mars, en a appelé au Conseil de sécurité en demandant l’instauration d’une zone d’exclusion aérienne. Je voudrais aussi saluer l’engagement de l’Union africaine qui a appelé à l’arrêt des violences contre les civils.

Malgré ces appels à la paix, la situation en Libye est aujourd’hui plus alarmante que jamais. Au moment où je vous parle, les troupes du colonel Kadhafi poursuivent la reconquête violente des villes et des territoires qui s’étaient libérés. Nous ne pouvons pas laisser faire les fauteurs de guerre ! Nous ne pouvons abandonner à leur sort des populations civiles victimes d’une brutale répression. Nous ne pouvons laisser bafouer la légalité et la morale internationales.

C’est pourquoi la France a voulu contribuer de toutes ses forces au sursaut de la communauté internationale en travaillant, avec la Grande-Bretagne et les Etats-Unis d’Amérique et d’autres, à l’élaboration du projet de résolution qui nous est soumis.

Avec cette résolution, nous nous donnons les moyens de protéger les populations civiles libyennes :

- D’abord en mettant en place une zone d’exclusion aérienne et en autorisant les membres de la Ligue arabe et les Etats membres qui le souhaitent à prendre les mesures nécessaires pour sa mise en œuvre.

- Ensuite en autorisant ces mêmes Etats à prendre, outre la zone d’exclusion aérienne, toutes les mesures nécessaires pour protéger les populations et les territoires, y compris Benghazi, qui sont sous la menace d’une attaque des forces du régime de Kadhafi.

- Enfin, en renforçant les sanctions adoptées à l’encontre de ce régime, qu’il s’agisse de la mise en œuvre de l’embargo sur les armes, du gel des avoirs des autorités de Tripoli ou de l’interdiction de vol des compagnies aériennes libyennes.

La France appelle solennellement tous les membres du Conseil de sécurité à soutenir cette initiative et à adopter cette résolution. Si ce mandat est voté, elle est prête à agir, avec les Etats membres, notamment arabes, qui le souhaiteront.

Nous n’avons plus beaucoup de temps. C’est une question de jours, c’est peut-être une question d’heures. Chaque jour, chaque heure qui passe, resserre l’étau des forces de la répression autour des populations civiles éprises de liberté, et notamment de la population de Benghazi.

Chaque jour, chaque heure qui passe, alourdit le poids de la responsabilité qui pèse sur nos épaules.

Prenons garde d’arriver trop tard !

Ce sera l’honneur du Conseil de sécurité d’avoir fait prévaloir en Libye la loi sur la force, la démocratie sur la dictature, la liberté sur l’oppression.

Je vous remercie.

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